Le moment est-il venu pour le luxe de faire sa révolution, d’intégrer les nouvelles technologies, de s’adapter au monde qui évolue? La question mérite d’être posée lorsque l’on sait que, pour la première fois en 20 ans (1975 à 1995), le marché mondial du luxe a inversé sa courbe de progression (- 1 %). Penchons-nous, tout d’abord, sur ce secteur qui ne ressemble en rien aux autres avant de découvrir quelques pistes réussies d’intégration de nouvelles technologies.
Le luxe : un secteur à part
Comme le souligne Jean-Noël Kapferer, expert mondial de la stratégie des marques, le modèle d’affaires du luxe est basé sur « la rareté, garante de la qualité et du sentiment de privilège ». Ainsi, son marketing relève d’un jeu subtil entre la présence et l’absence. Pour éviter que les technologies (sites Internet, plateformes de vente…) leur apportent du succès – voire trop de succès –, les acteurs du luxe doivent développer un marketing basé sur la « rareté artificielle » en recourant à des signatures d’artiste, à des séries limitées ou encore à la chrono-rareté. On s’entend que toutes les entreprises évoluant dans le secteur du luxe ne raisonnent pas ainsi, même si elles le souhaiteraient! Beaucoup doivent désormais innover, augmenter leurs investissements en R&D, faire leur propre révolution si elles ne veulent pas disparaître corps et bien. Cette mutation est l’occasion aussi d’atteindre une nouvelle clientèle issue des marchés émergents (principalement la Chine), mais surtout de s’adapter à ses nouveaux clients, les digital natives qui sont nés avec un téléphone intelligent en poche.
De la technologie à tous les stades
Quand on parle du luxe, l’artisanat n’est jamais très loin : ce savoir-faire et cette tradition qui se transmettent de génération en génération en assurant la qualité du produit. Quid des technologies dans l’artisanat? Pour éviter que nos artisans créatifs disparaissent, ils doivent intégrer des technologies, que ce soit au moment de la conception, de la fabrication ou encore de la commercialisation du produit. Un bel exemple nous est donné grâce à Sericyne qui est devenue la première entreprise mondiale à fabriquer de la soie naturelle en 3D, proposant de la soie encore plus solide, plus lumineuse et plus scintillante qui fait le plus grand bonheur des architectes d’intérieur et des créatifs de tout bord. Dans un autre registre, qui aurait pu croire que le métier de tailleur survivrait au prêt-à-porter de masse? Grâce à son concept de « clé de coupe », Le Chemiseur connaît un formidable succès auprès de clients qui souhaitent avoir une chemise à leur parfaite dimension dans le tissu de leur choix. Conclusion : une visite sur le site Internet et la saisie de six mesures (taille de l’encolure, longueur des bras…) clés plus tard, la chemise de vos rêves est en production. Enfin, pour répondre à l’évolution du luxe qui est en voie de passer de la culture de l’avoir au culte de l’être, la technologie a permis le développement de plateformes collaboratives sur lesquelles les clients viennent échanger – comme on le fait avec un appartement – une tenue de luxe (qui aurait été déraisonnable d’acheter), pour vivre une expérience hors du commun le temps d’un évènement précis (mariage, vernissage…).
Avec quelques décennies de retard, le secteur du luxe se doit d’intégrer aujourd’hui les technologies pour répondre à une nouvelle clientèle et à des besoins nouveaux, en gardant à l’esprit les propos de François-Henri Pinault : « Notre mission est de garantir que le luxe reste fidèle à son image (…) et (qu’il) s’expose à la lumière de l’innovation technologique sans que cette dernière l’aveugle. »
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