Aujourd’hui, 48 % des emplois au Canada sont occupés par des femmes. Le monde du travail semble donc respecter la parité hommes/femmes. Toutefois, la présence des femmes dans chaque secteur d’activité est inégalement répartie, et les métiers techniques n’échappent pas à la règle, bien au contraire. Même si leur proportion a augmenté de façon constante au Canada lors de la dernière décennie, en 2018 elles n’occupent que 17.4% des ingénieurs en exercice au Canada. Et, suivant l’emploi et le domaine dans lesquels elles évoluent (santé, environnement, génie civil…), leur nombre varie exponentiellement. Chez les technologues et techniciens en biologie, la proportion hommes/femmes est équivalente à la moyenne nationale, alors qu’elle est de 1 femme pour 10 hommes chez les électroniciens et électroniciennes d’entretien en biens de consommation.
Selon Yaroslaw Zajac, directeur général du Conseil canadien des techniciens et technologues (CTT), la cause de la faible présence de techniciennes et de technologues est culturelle. « Au Canada, les femmes ont tendance à se tenir à l’écart des métiers techniques. Mais nous travaillons énormément pour inverser cette tendance, car lorsque celles-ci décident de venir gonfler nos rangs, elles sont le plus souvent d’excellentes techniciennes ou technologues. »
Pour John Leech directeur général de l’Association pour les professionnels en technologie de la Colombie-Britannique (ASTTBC), la prédilection des femmes pour tels ou tels secteurs dépend de multiples facteurs. « Sans vouloir tomber dans les stéréotypes, il semblerait que les femmes se sentent moins à l’aise dans des secteurs où elles évoluent entourées de machines et d’équipements lourds comme la mécanique. De plus, certains secteurs ont mauvaise presse chez les femmes. C’est le cas du génie civil, qui souffre de sa réputation de milieu machiste. Pourtant, comme partout, les mentalités ont évolué. »
Pour Gail Powley, coprésidente de Women in Science, Engineering and Technology (WISEST) à Edmonton, les femmes techniciennes et technologues tout comme les femmes ingénieures doivent apprendre à évoluer dans un univers où les hommes sont traditionnellement plus nombreux. « Parce que les femmes sont moins nombreuses dans ces secteurs, les regards ont tendance à se fixer sur elles. Il faut qu’elles fassent preuve de persévérance et qu’elles n’oublient pas qu’elles ont énormément à apporter aux métiers techniques. »
Afin d’augmenter le nombre de femmes travaillant dans des métiers techniques, Ingénieurs Canada a mis en place l’initiative 30 en 30 qui vise à atteindre l’objectif de 30% de femmes ingénieurs en 2030. Également, le gouvernement canadien ainsi que des associations féminines ont mis au point une stratégie pour améliorer la parité. Cette stratégie ne vise pas uniquement les femmes qui exercent un métier technique. Cependant, étant donné leur faible représentation dans ce milieu, sa pertinence sera en grande partie mesurée en fonction du succès qu’elle rencontrera dans ce secteur.
Ces mesures en faveur de la parité comprennent une aide, sous forme de déductions, pour les femmes étudiantes ayant des frais de garde d’enfant. Le secteur privé, en partenariat avec le gouvernement fédéral, a octroyé des fonds afin de permettre la création de cinq chaires des femmes en sciences et en génie dans différentes universités. Depuis 1986, le programme des contrats fédéraux (PCF) impose aux sociétés qui reçoivent des contrats de biens et services d’une valeur de 200 000 dollars et qui embauchent au moins 100 salariés la mise en œuvre des initiatives d’équité en matière d’emploi. Cette loi concerne près de 850 compagnies qui emploient un million de personnes.
Les femmes qui font le choix de travailler dans des secteurs technique et technologique peuvent aussi compter sur la conjoncture économique et démographique pour les avantager. En effet, avec le départ des baby-boomers à la retraite, de nombreux secteurs risquent de rencontrer une pénurie de main-d’œuvre. Le recrutement des femmes est donc une solution manifeste. Selon le rapport Les milieux de travail conviviaux, rédigé par Denise Mclean, membre du Centre d’excellence pour l’avancement des femmes et du Conference Board of Canada, et destiné aux ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la condition de la femme : « Attirer des femmes permet d’élargir le bassin des talents disponibles et de recruter de meilleurs éléments. »
Non seulement les femmes peuvent combler les emplois vacants, mais elles améliorent l’image de marque d’une entreprise. D’après le rapport de Denise Mclean : « La fiche de route d’une entreprise en ce qui concerne les pratiques de gestion des ressources humaines, et notamment l’avancement des femmes, peut influencer les décisions des investisseurs. »
Bref, les femmes ayant fait le choix du secteur technique bénéficient non seulement d’un soutien moral, mais aussi d’un soutien légal. Dans les années qui viennent, leur présence dans ce secteur sera fortement appréciée et sera synonyme de valeur ajoutée.