Nombreuses sont les villes à l’échelle mondiale qui souhaitent répliquer le modèle économique de la Silicon Valley. C’est le cas de Lagos (capitale du Nigéria) qui, forte de ses atouts démographiques et économiques, suscite même la convoitise de Facebook et de Google qui espèrent s’investir auprès de ces entrepreneurs. Faut-il y voir un partenariat équilibré ou une tentative de cybercolonisation?
De l’Afrique à la Yabacon Valley
Toutes les études démographiques s’entendent pour dire que l’Afrique jouera un rôle important dans les décennies à venir, et ce, pour différentes raisons. Une population jeune (60 % a moins de 24 ans), une population en croissance (doublement d’ici 2050 pour atteindre 2,2 milliards d’habitants), une population connectée (davantage de téléphones intelligents en Afrique qu’en Europe), un secteur technologique en forte croissance (442 pôles de haute technologie, contre 10 en 2010). Parmi les pays africains, le Nigéria sort du lot avec son volume de fonds levés (100 millions dollars américains en 2016) et sa capitale qui est la plus peuplée d’Afrique et qui offre le taux de croissance démographique le plus élevé du continent. Malgré ses divers problèmes sociaux – liés à l’accès à l’eau, l’électricité, l’éducation, la santé… –, le pays voit des jeunes pousses (start-up) fleurir, se développer, se spécialiser notamment dans les domaines de l’innovation et du développement de haute technologie… C’est ainsi qu’est né Yaba, le premier groupement d’entreprises apparu au Nigéria, situé à Lagos proche de l’Université de Lagos et du Collège de technologie Yaba dans lesquels enseignent les meilleurs professeurs du pays. Un emplacement idéal pour un futur partenariat entreprise-université.
Partenariat équilibré ou biaisé?
Les caractéristiques du Lagos n’ont pas laissé indifférent Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, lors de sa visite en 2016 qui décida, un an plus tard, d’y installer son premier pôle technologique en Afrique. Même si ses ambitions affichées sont sincères – assurer l’innovation et l’entrepreneuriat auprès de la jeunesse africaine, former plus de 50 000 individus pour leur offrir des connaissances numériques –, Facebook se voit accuser, par certaines organisations non gouvernementales internationales, de cybercolonisation. En proposant un accès gratuit à Facebook, les Nigérians ne seront-ils pas pieds et mains liés avec Zuckerberg? Ne seront-ils pas contraints d’abandonner tout désir de développer leur propre plateforme? Les sphères économiques nigérianes pensent, non seulement que les Nigérians peuvent s’affranchir des GAFA, mais qu’ils ont aussi les compétences et la détermination pour créer leurs propres jeunes pousses afin de répondre mieux que quiconque à leurs besoins spécifiques, pour adapter des modèles existants à leurs propres problématiques, voire pour créer leurs propres modèles à vocation mondiale. Les entrepreneurs nigérians de jeunes pousses s’investissent principalement dans les domaines de l’énergie (modèle d’énergie solaire Pay-as-You-Go), de la finance (paiement mobile avec FinTech) ou encore du e-commerce (hausse de près de 75 % des investissements entre 2016 et 2017).
Entre l’« l’intrusion » des GAFA au Niger et le développement 100 % nigérian de jeunes pousses – qui présentent tous deux des limites et des contraintes –, une troisième voie serait peut-être salutaire. Celle du partenariat entre le Nigéria et un acteur étranger, à l’instar de l’Alliance numérique africaine, qui permet à chacune des parties de s’investir, de se développer, d’échanger à jeu égal.
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